Imprimer cette page

Mieux lire à distance

Lire plus, lire mieux - Ressources, réseaux et outils professionnels

Dans un contexte de surproduction et dans le cas particulier de la librairie française à l’étranger éloignée des éditeurs et des sources d’information, comment est-il possible de travailler le rayon littérature et principalement les nouveautés ? L’objet de cet article est d’exposer quelques idées de ressources et d’outils professionnels pour faciliter les lectures, préparer les choix des libraires le plus en avance possible pour coller à l’actualité des parutions.

Deux temps forts concernant les sorties de romans en France :
- La rentrée littéraire de septembre, avec entre 500 et 600 romans chaque année (581 romans en septembre 2017)
- La rentrée littéraire d’hiver, en janvier, avec un peu moins de 500 titres (498 en janvier 2018)

Comment s’y retrouver dans la pléthore de la production française, faire les bons choix, remplir au mieux son rôle de prescripteur et représenter justement la diversité de la production française à l’étranger ?
Voici quelques pistes proposées par Maryline Noël, libraire au Chili à la librairie Le Comptoir.

Maryline constate au fil de son expérience de librairie que c’est son rôle de prescripteur qui amène le client à pousser la porte de sa librairie et que ce sont les conseils qu’elle sera en mesure de lui donner qui encouragera son achat. Si le client sait ce qu’il veut, il n’a pas besoin du libraire, il se tourne directement vers Amazon ou la vente en ligne. Au hasard de ses lectures, elle tombe sur un ouvrage intéressant : Incognita Incognita ou le plaisir de trouver ce qu'on ne cherchait pas par Mark Forsyth (éditions du Sonneur). Ce livre, court pamphlet sur les conditions de survie de la librairie indépendante, applique au commerce du livre la théorie des trois catégories du savoir humain : Le « connu-connu », « le connu-inconnu » et « l’inconnu-inconnu ».

Le « connu-connu », c’est ce que l’on connait, par exemple si on le rapporte au livre, c’est le Petit Prince, qu’on connait et qu’on a lu. Puis il y a le « connu-inconnu », qui serait ce que l’on connait mais que l’on a pas encore lu, par exemple un livre dont on a lu une interview de l’auteur, un best-seller dont on a entendu parler ou un prix littéraire dont tout le monde parle et qu’on achètera peut-être un jour, ou peut-être pas d’ailleurs. En tous cas c’est quelque chose dont on connait l’existence, même si on n’en connait pas le contenu. Le libraire indépendant, évidemment, essaie de répondre à ce type d’attentes, mais il est souvent confronté à un problème redondant : il n’est pas le seul à pouvoir répondre à cette demande et à fournir à son client le Petit Prince ou le dernier Prix Goncourt. D’autre part, le libraire ne peut jamais tout avoir : tous les livres connus, c’est-à-dire les classiques, les incontournables, les prix littéraires, les 50 meilleures ventes, etc. Il n’est pas rare pour un libraire de l’étranger de se voir bouder par un client qui ne trouve pas ce qu’il cherche et doit attendre un mois pour recevoir sa commande.

Arrive la troisième catégorie, celle de « l’inconnu-inconnu » dans laquelle les librairies indépendantes ont leur rôle à jouer. Selon Maryline, « plus qu’un rôle, c’est là qu’elles vont tirer leur épingle du jeu ! ». « L’inconnu-inconnu » ce sont tous ces livres qui existent et dont les clients n’ont aucune idée qu’ils existent. « L’inconnu-inconnu », c’est le moment où le client entre dans une librairie et ressort avec un livre qu’il ne cherchait pas au départ. Ce type d’achat, il ne pourra jamais le faire sur internet puisqu’il ne sait même pas ce qu’il cherche avant de le trouver dans la librairie. « En tant que petite librairie indépendante du bout du monde qui ne pourra jamais lutter contre Amazon ou contre une grosse chaine de librairies, je me suis dit, c’est là-dessus qu’il faut que je mise sinon je ne survivrai jamais ! C’est également cette dimension de « l’inconnu-inconnu », qui fait qu’aucune librairie ne ressemble à une autre, et qui fait que les librairies resteront longtemps irremplaçables. » Mais pour cela, pour pouvoir se plonger dans l’« inconnu » de la production littéraire française, il faut « sortir des sentiers battus », selon Maryline Noël, et lire le plus possible. Dans la mesure du possible et afin de faire sa sélection des nouveautés, la libraire chilienne fait le choix de lire en amont, avant même parution. Il est en effet désormais possible et beaucoup plus facile pour les libraires éloignés de France et qui n’ont pas la possibilité de recevoir des représentants, d’avoir accès à des épreuves numériques.

Voici donc une petite liste (non exhaustive) de ressources et d’outils permettant à chaque libraire de l’étranger d’avoir accès aux informations, de pouvoir lire en amont et à distance afin de faire les meilleurs choix :

La plateforme Eden Livres, plateforme de distribution de livres numériques et qui peut servir d’outil de services de presse ou épreuves numériques pour libraires
La plateforme Netgalley, plateforme qui est également destinée aux professionnels du livre
Le réseau PAGE des libraires, réseau de plus de 250 libraires, en France, quelques-unes en Belgique, au Canada, et une au Chili qui recommandent des livres, à travers une revue, éditée 6 fois par an et sur un site web qui a une partie publique et une autre professionnelle pour les libraires inscrits.
Le prix Libr’à nous, prix littéraire organisé par des libraires
Le prix Rivages des libraires, concerne des titres de romans policiers des éditions Rivages
• Les prix qui proposent la participation des clients de la librairie (ex : Prix Emmanuel Roblès)
Suivre les grandes émissions littéraires : La Grande Librairie (télévision), Le masque et la plume (France Inter), La librairie francophone (TV5 Monde et France Inter), Le magazine de la Santé avec Marina Carrère d'Encausse et Gérard Collard (France 5)
• Privillégier évidemment les relations directes avec les éditeurs...

 

Maryline

Maryline Noël, Librairie Le Comptoir, Santiago du Chili